Pierre Mabille

Depuis 2006, le grand mur du hall d’accueil du Frac est investi par des artistes. La pratique des wall drawing et wall painting permet de faire naître des dialogues pertinents entre architecture et arts visuels.

«Pour le hall du Frac ma proposition rassemble trois questions déclinées dans mon travail : l’impact de la couleur, l’apparition d’une forme et l’amplitude d’interprétation qu’elle ouvre. L’impact coloré repose sur un rapport contrasté de deux couleurs, se manifestant différemment en vision éloignée (à l’entrée du parc, à travers les vitres) et en vision proche, dans le hall. L’organisation globale des formes sur le mur emprunte librement à un principe ornemental, permettant au regard de jouer à cache-cache avec les signes, visibles alternativement en positif ou négatif. Le mur est peint dans sa totalité, dans un jeu optique « all over » de formes/contre-formes, augmenté par la vibration chromatique. Enfin, une liste de mots inscrits sur la baie vitrée propose au visiteur les noms possibles de cette forme». 
Pierre Mabille



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Depuis 1997, Pierre Mabille répète une forme unique, une forme oblongue, dans des peintures de différents formats, de différents supports : « Lorsque j’ai commencé ce travail, je ne savais plus quelle direction emprunter. J’avais le sentiment de produire encore et toujours la même imagerie. Alors je me suis imposé cet exercice : sélectionner une forme dans ma palette de signes. Je la souhaitais difficilement identifiable, ni trop abstraite, ni trop significative, d’une géométrie floue, indéfinissable, ambiguë. Dans mon vocabulaire initial, il symbolisait le cyprès. À l’origine vertical, il était beaucoup plus marqué, rappelait notamment la mandorle, déterminait un haut et un bas. Je l’ai disposé horizontalement. Il a gagné en légèreté. Plus aérien, il m’offre la possibilité de composer en étagement, en suspension, d’oublier le sol et le ciel, donc de quitter l’image » [1]. Cette forme, Pierre Mabille en laisse l’interprétation libre par l’entremise d’une liste associative qui contient 400 termes : « (...) une barque, une Citroën 15 cv 1971 type smn, une boutonnière, un silex taillé, un pétale, une langue, une sucette, une languette, une pierre, un caillou, une bouée (...) ». La simplicité de la forme, son réseau analogique constitue un des enjeux de cette peinture jouant des déplacements minimes : « Avoir constitué la liste m’a délivré de l’enfermement dans l’image. Cette suite d’appellations contient l’imaginaire, mon désir de représentation, me laissant ainsi assembler forme et couleurs à ma guise en une peinture libérée de toute lourdeur interprétative. Peinture qui revêt une apparence d’abstraction sans être vraiment abstraite puisque la liste existe » [2]. Cette forme peut être seule sur le support, doublée, triplée... Cette forme peut être isolée, enchevêtrée, tramée, superposée... Cette forme peut avoir différentes tailles, différentes couleurs, être pleine ou un contour. Cette forme peut être peinte, imprimée, produite par insolation... 


Eric Suchère « Pierre Mabille »– extrait du catalogue Vous êtes ici - FRAC Auvergne, 2006.
[1] Pierre Mabille, La Forme de la couleur, entretien avec Éric Fayet, dépliant de l’exposition au musée d’art Roger Quillot, Clermont-Ferrand 2005, n. p. [2] Ibid.