Hoël Duret

BUILD YOUR OWN LANDSCAPE

J’ai rapidement constaté l’impossibilité de travailler le paysage américain in situ, le trouvant impossible à retranscrire, complètement épuisé dans ses représentations et le découvrant totalement clos et physiquement inaccessible du fait des ranchs et de leurs immenses terrains privés clôturés.
Mon idée fut alors de travailler les outils de la création des cadres de représentations classiques de ces paysages et du hors champ, constituant la majeure partie de ces espaces impossibles à retranscrire, comme seule finalité.

Le paysage est utilisé aux Etats-Unis de manière politique comme étant l’assise de son iconographie, se substituant ainsi à une histoire qu’elle ne possède pas, qu’elle a du construire pour se démarquer de la vieille Europe. Iconographie développée dans l’esprit du sublime romantique, mêlant puissance, émerveillement et effroi.

Toute iconographie politique étant soumise à un contrôle scrupuleux, nous pouvons parler de construction du paysage américain, même dans ses re-lectures plus littéraire ou cinématographique dans lesquelles subsistent la puissance du paysage sur son regardeur. Ainsi le paysage est la condition esthétique du territoire, c’est ensuite le pays, la nation, qui en décide de la construction idéologique, de son imagerie transcendentale dans le cas des Etats-Unis. Le jeu n'était pas de donner des images de ces paysages construits mais de proposer, de rejouer certains canons, dans le mode d'observation du paysage de manière à pouvoir éprouver ces constructions mentales.

En qualité de modèle référent, j’ai choisi de travailler à partir des vidéos de démonstration de produits de la chaine de distribution The Home Depot. Leur particularité étant de vouloir montrer, expliquer, tout en ayant des conditions de tournage effroyables (vent, bruit extérieur...) et un montage désastreux (utilisation à outrance de l’accéléré). Elles en deviennent ainsi quasi incompréhensibles en dehors de l’intention première (le sujet de la vidéo) et l’image finale du but atteint, l’image de fin.

Comme outils, j’ai donc choisi huit objets : un escabeau, une paire de chaussures de marche, une planche, une sangle, un objectif grand angle, une pince coupante, un marteau et un rouleau de fil barbelé. Je filme leur utilisation mais pas le résultat, mon but étant d’expliquer comment fabriquer un paysage puisque l'idée est bien d'observer plusieurs "types" ou "mythes" du paysage.

Les 4 points d'observation symptomatiques expliqués dans les 4 séquences, sont donc : 1, Sans titre, le premier est lʼintroduction de la vidéo, on mʼy voit planter une fence (clôture de fil barbelé), élément essentiel de la construction du paysage Texan. Ce territoire immense étant découpé par les clôtures des immenses ranchs dont les terres semblent inoccupées. 2, The Kerouac Perspective, séquence dans laquelle je fixe une planche de bois au travers de la fenêtre dʼune Cadillac de manière à mieux voir le paysage depuis la voiture comme l’écrivain de la beat generation Jack Kerouac le développe dans ses romans-expériences du territoire américain, par la route. 3, Hollywood Horizon, fin hollywoodienne me montrant disparaissant seul à l’horizon dans l’attitude classique du lonesome cowboy. La scène est rendue ratée par son cadrage tordu et filmée en bord de route par une caméra simplement posée au sol. 4, Overlook (Littéralement, “surplomb”. Ce terme est utilisé dans les parcs naturels US pour désigner un point de vue en hauteur aménagé), ascension dʼune colline avec un escabeau sur le dos et un objectif à la main. Je finis par installer mon escabeau en haut de la colline, monté dessus etregarder au loin, dans le hors champs qui constitue lʼessentiel du mythe du wilderness américain, l’idée de cette nature sauvage et puissante, sans aucun signe de présence humaine, symptomatique de ce pays.

Cette vidéo est ainsi une série de 4 expériences tournées en one-shot (une seule prise quoiqu’il arrive). Ma posture en temps que personnage y force les traits d’un individu un brin conquérant mais surtout à côté de ses pompes, tentant ces vaines expériences dans une fascination totale pour l’environnement dans lequel il se trouve, celle d’un étranger submergé par ces paysages.

Le jeu de la vidéo était donc de combiner cette recherche sur les mythes paysagers américains suite à mes ressentis sur place tout en gardant ma posture de jeune français mettant le pied pour la première fois sur le sol américain.

Cʼétait un défi que de venir sans projet mais avec un outil (ma caméra), lʼenvie de travailler dans le contexte de notre résidence et la conviction réalisée sur place de lʼimpossibilité de travailler le paysage in situ. Cette vidéo est une expérience qui restera dans mon travail comme test essentiel dʼune nouvelle façon de travailler. Le fait de se retrouver avec ces moyens de production réduit m’a plu et je pense plus m’y retrouver dans ce côté bricoleur/aventurier. Si les préoccupations restent les mêmes quant à mon travail, la manière de faire a changé cette fois-ci.

Il nʼempêche que jʼai passé beaucoup de temps pour prendre du recul vis-à-vis de lʼenvironnement qui était le nôtre et travailler le contenu de cette expérience. En parallèle de cette vidéo, je suis en train de travailler sur un autre projet plus ambitieux dont jʼespère avoir les premières formes pour lʼexposition collective de la rentrée prochaine.

La vidéo est visible ici : http://monadeislandproject.free.fr/06video/landscape.html

Build Your Own Landscape Video 11'52'' Avril 2011

Eden Morfaux












MARFA SÉRIE | AVRIL 2011
Résidence d’artiste à Marfa, Texas, Etats-Unis
Ecole Supérieure des Beaux-Art de Nantes Métropole
5 sculptures, planche de sapin, peinture acrylique blanche, dimensions 140 x 42 x 45 cm

Noémie Chauvet

La sculpture s'oriente selon des axes fondateurs, horizontalité, verticalité. Elle se développe, s'articule de rigueurs géométriques, s'élève sur une feuille métallique et s'interrompt. Fixée au mur, elle s'avance dans l'espace. Ses combinaisons dans l'espace et au mur grâce à la lumière, révèlent les matériaux, la couleur. Ce sont ces variables qui la font vibrer.





Sans titre, avril 2011, inox, bois, 2,10 x 2,80 m

David Droubaix


Placé à l’entrée du Marfa Studio of Art, un volume couleur anthracite casse le regard du spectateur sur l’espace d’exposition et l’oblige à adopter un point de vue différent.



 Sans titre n°3, bois, peinture, 2011, 40 x 300 x 5 cm.